Christine Paillard

Directrice de recherche au CNRS, Université de Bretagne occidentale

«Toute petite, je voulais être détective, j’adorais rechercher et trouver les coupables. A l'université, je me suis donc tournée assez naturellement vers une carrière de chercheur. Ma thèse portait sur la recherche des causes de mortalités hivernales anormales de bivalves, les palourdes. En collaborant avec les professionnels sur le terrain, nous avons pu nous rendre compte que c'était une maladie contagieuse et non un problème de pollution comme on le pensait au départ. Nous l'avons appelée "maladie de l'anneau brun", car le bord interne de la coquille des animaux malades apparaissait ornementé d’un dépôt organique brun. La mise en évidence d’une nouvelle espèce bactérienne, localisée entre la coquille et l’animal, allait à l’encontre des idées reçues sur les causes de mortalités des bivalves. Cette découverte  a été décisive dans ma vie de chercheuse. J’essaie que les étudiants soient créatifs et n'aient pas peur d'inventer, d'avoir un côté "explorateur".

La maladie du mollusque marin se situe à l'intersection de trois composantes: le pathogène, l'hôte et l'environnement. Elle sera favorisée lorsque les conditions environnementales deviennent défavorables à l’hôte -comme lors de fortes températures, de pollutions ou lors de la présence  de concentrations élevées de micro-plastiques, de pesticides ou de métaux. Récemment, nous avons pu démontrer que les fortes mortalités estivales d’ormeaux étaient liées à une synergie de facteurs associant une bactérie pathogène, le réchauffement climatique et une déficience immunitaire au moment de la reproduction. Les avancées de ces travaux de recherche sont le fruit d’un travail d’équipe, associant des échanges stimulants et de belles aventures humaines. Depuis quelques années, je questionne mon travail de recherche avec des chercheurs en sciences humaines et avec des artistes, ce qui me permet d’appréhender autrement la complexité du vivant.»